Accéder au contenu principal

C'est officiel, un premier centre de recherche universitaire sur l'utilisation de substances psychédélique va ouvrir en Angleterre


Cela paraîtra anecdotique à certain, des recherches sur les effets de drogues psychédéliques sont produites depuis des décennies. Cependant, en plus de se consacrer spécifiquement sur ce sujet, ce centre ouvert et dépendant à la fois de l'Imperial College London et du Imperial College Healthcare NHS Trust, axera ses recherches sur les effets des substances hallucinogènes sur certains troubles et de la possibilité de les utiliser pour étudier la conscience. Il faut dire que l'Imperial College London n'en est pas à son coup d'essai : Carhart-Harris & al (2017) par exemple ont étudiés les effets de la psilocybine, une substance tirée du psylocybe, un champignon hallucinogène, sur les patients dépressifs ne réagissant pas aux anti-dépresseurs. Et ce n'est qu'une étude parmi tant d'autres. C'est ce même Robin Carhart-Harris de l'étude ci-dessus qui dirigera ce centre de recherche.
Un autre objectif est d'en faire un prototype des établissements de soins licenciés se spécialisant dans l'utilisation de substances hallucinogènes.
En somme, une bonne nouvelle pour la recherche et la lutte contre les troubles psychiatriques.


Mais au-delà des perspectives pour la psychiatrie, il y a un aspect qui me turlupine et auquel j'ai pensé quasiment de suite. Pour comprendre comment je suis passer de l'un à l'autre, il faut savoir que je m'intéresse beaucoup au phénomènes des nouvelles religions et au psychothérapie et au développement personnel dans la vague New-Age. Pour faire simple, « nouvelle religion », c'est le terme scientifique anglophone (new religion) en sociologie qui regroupe les nouveau mouvements spirituels et religieux que nous appelons secte en France. En revanche, dans le milieu militant anti-secte anglophone, on parle de « cults ». La sociologie essaye de garder son objectivité et de ne pas confondre le mouvement et ce qu'il fait : ainsi il ne distingue pas les religion et les « cults » avec d'un côté les bons et de l'autre les mauvais, mais considère que l'on peut-être une « nouvelle religion et avoir ou non un mode de fonctionnement nocif pour ses adhérents. Un jour, promis, je ferais un article sur la différence de perspective entre la sociologie et les mouvements militants anti-secte concernant les mouvements dits sectaires. La sociologie anglophone à d'ailleurs un regard critique sur les mouvements anti-sectes. Cependant, ce n'est pas parce les mouvements anti-sectes sont critiquables, que ce qu'ils dénoncent n'existe pas. Je suis persuadé de la bonne volonté de ceux-ci, et je considère que leur action est profitable à la société. Et c'est pour cela que si je salue la recherche sur les substances hallucinogènes dans le monde académique, le re-pompage de celles-ci par différents mouvements spirituels ou de développement personnel m'inquiète un peu, d'où le passage militant qui va suivre (ou comment une simple brève se casse la figure en texte militant, on appellerait ça un mini-fail de la brève ? ) 
Donc, cela pose des questions concernant l'utilisation de ces substances dans des cas plus officieux. En effet, l'usage de drogues non pas à des fins purement récréatives mais de développement personnel et spirituel risque de détourner ces recherches afin de se justifier.
En effet, dans les milieux New-Age, une branche particulière appelée néo-chamanisme s’appuie sur l'utilisation de substances psycho-actives (l'hayahuasca, l'iboga par exemple). Bien sur, des tas de néo-chamanes ne font pas appel à l'utilisation de drogues, et des tas de thérapeutes alternatifs ou spirituels font appels aux drogues sans être néo-chamanes. Cette engouement pour l'usage de drogues pour atteindre des niveau de conscience dits supérieurs ne sont pas neuf. Lorsque le mouvement hippie était en plein boum, Carlos Castañeda sortait son ouvrage L'herbe du Diable et la Petite Fumée, une ode à l'utilisation des plantes hallucinogènes afin d'atteindre une dimension débarrassée des limites des perceptions ordinaires et de la rationalité.
De même, d'un point de vue moins traditionnel, plutôt inspiré développement personnel et psychothérapie, un psychologue du nom de Timothy Leary encouragera l'usage de LSD à des fins thérapeutiques (alors que les preuves scientifiques n'existaient pas à l'époque!). Il pensait aussi que le LSD était une porte vers d'autres perceptions (comprendre par la des perceptions mystiques, médiumnique).
Le problème, c'est que l'usage de ces substances ne sont pas toujours maîtrisés : les voyages initiatiques aux Brésil afin de tester l'Hayahuasca à été traumatisantes pour certaines personnes, voir mortelle (voir ici). A mesure que la recherche scientifique mettra à jour les bénéfices des certaines substances pour le traitement de certains troubles, et que des découvertes sur la conscience (au sens scientifiques) seront faites, ces mouvements s'en empareront (ce qui doit déjà être le cas). Si on ajoute en plus les déformations imposées par la recherche de buzz de certains média, cela n'arrangera rien. Mais dans les année à venir c'est aussi le publique qui sera exposé à la vulgarisation scientifique sur ce sujet, et m'est avis (mais ce n'est qu'une opinion) que lorsque certains d'entre eux voudront tester les effets bénéfiques de ces substances, ils auront plus de chances de contacter des praticiens New-Age leur promettant mont et merveilles que des scientifiques leur expliquant pourquoi cela ne doit se faire que dans certaines conditions, sous surveillance médicale.
Il se peut, et ce n'est encore qu'une opinion, que dans quelques années, l'usage de plantes hallucinogènes dans le New-Age aient un regain d'intérêt grâce à la popularisation des ces travaux de recherches, ce qui attirera du public. Un travail de prévention et de vulgarisation scientifiques sur la recherche sur l'usage de substances hallucinogènes couplé à l'éducation aux média et à l'esprit critique pourrait être un axe de travail intéressant.



Pour aller plus loin :

  • La brève de l'Imperial College London annonçant l'ouverture du Centre de recherches (plus d'informations son données et il y a une photo de Cahrart-Harris si ça vous intéresse)
  • Pour en savoir plus sur le lien entre drogue et mouvement New-Age, voir cet interview de de Guy Rouquet : BULLES N°108, pages 14 à 20, 1er décembre 2010, et BULLES N° 109, pages 21 à 27, mars 2011. Vous retrouverez cela ici : http://www.psyvig.com/doc/doc_19.pdf
  • Le site http://www.psyvig.com/, une référence concernant les dérives liés au New-Age et à certaines psychothérapies

Références :

  • Carhart-Harris, R. L., Roseman, L., Bolstridge, M., Demetriou, L., Pannekoek, J. N., Wall, M. B., ... & Leech, R. (2017). Psilocybin for treatment-resistant depression: fMRI-measured brain mechanisms. Scientific reports, 7(1), 13187.
  • Castaneda, C., & Doury, M. (1972). L'herbe du diable et la petite fumée. Paris.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Mini-fail de la synergologie : la fente palpébrale

La synergologie se définit comme « la discipline qui permet de décrypter le fonctionnement de l'esprit humain à partir de la structure de son langage corporel afin d'offrir la communication la mieux adapté » (Turchet, 2015). Elle s’appuierait sur un « éthogramme » reliant des milliers de gestes, postures, expressions faciales, zone de démangeaison (visible par l'acte de se gratter) à des significations très précise. Je mets éthogramme entre des guillemets car il me semble qu'en éthologie, si un éthogramme est bien un répertoire de comportements se voulant le plus exhaustif possible, il s'y rajoute un description du contexte et éventuellement de la fonction de ces comportements se voulant le plus objectifs possible. Ainsi on ne parlera pas de l'immobilité tonique du rat (lorsqu'il se fige) comme d'une expression de la peur, mais comme un comportement lors d'une situation de danger. Dans un éthogramme, la boite noire (pensées et émotions) ne sont pas

Lillienfield, un modèle pour les sceptiques et les psychologues.

 L'article qui suit risque de prendre un ton plus personnel. Déjà je me sens particulièrement redevable par rapport à ce psychologue en particulier. De plus, cet article est écrit à la hâte. "A la hâte sans donner de nouvel depuis plusieurs mois!? C'est la meilleure !" Et vous auriez raison. Ce serait parfaitement justifié.  Mr, Scott Owen Lilienfield, est mort à 59 ans, d'un cancer du pancréas, le 30 septembre de l'année 2020. Né le 23 décembre 1960 dans le Queens, il était expert en dans les troubles de la personnalité . Notamment on lui doit des recherches sur le trouble de la personnalité psychopathique.  Finalement, on avait que des données en rapport avec la loi, sur les critères de la psychopathie (sauf les critères de Cleckley et Hare, qui peuvent tout de même recouvrir des réalités hors incarcérations). Lilienfield nous décomposera le trouble de la personnalité en trois axes: la dominance sans crainte , la tendance à la méchanceté , et l' impulsiv

Les mystèrieuses stats du bonheur : 1. La part génétique

Ce billet est le premier d'une série de trois article sur la formule des 50%-40%-10% d'influence - respectivement génétique, de choix d'activité et environnementales – sur le bonheur. La deuxième partie est ici . La troisième partie est en cours de rédaction. Le saviez-vous : 50% de votre bonheur dépend de vos gènes, 10% de vos conditions de vie et 40% de la manière dont vous décidez de conduire votre vie. C'est scientifique, ne discutez pas... Mais comment on le sais ? Et si c'était un de ces chiffres fantaisistes sortis de nulle part et ne servant que d'argument marketing ? Une sorte d'équivalent des seuls 10% du cerveau que nous utiliserions ? J'ai une bonne nouvelle, contrairement au 10% d'utilisation du cerveau, dont on n'a absolument jamais su d'où ça sortait, les pourcentages sur le bonheur viennent bien de quelque part. Plus précisément, ces chiffres sont ceux donnés par Sonja Lyubomirski dans sont ouvrage : The Ho